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Dans
son autobiographie, Andréa Richard retrace les stations
marquantes de sa vie: née en 1934 à Sainte-Anne-de-Kent,
Andréa passe son enfance choyée et privilégiée à Bouctouche
au Nouveau-Brunswick. Très tôt, elle se sent appelée à devenir
religieuse. À l'âge de 16 ans, elle devient postulante
chez les Petites Soeurs des Pauvres à Montréal.
Pendant plusieurs années, elle travaille pour les pauvres
dans le cadre de cette communauté de religieuses actives
au Canada et en France, mais elle se rend bientôt compte
qu'elle devrait plutôt faire partie d'une congrégation
contemplative. Après avoir franchi bien des obstacles,
elle quitte les Petites Soeurs et entre au cloître des
Carmélites à Rouen. Tiraillée entre une
vie plus active et celle, entièrement contemplative, des
Carmélites, et gravement malade à plusieurs reprises,
Andréa rentre au Canada où elle envisage de fonder
un Carmel en Acadie, plus ouvert aux laïcs, pour mettre
les croyants en contact direct avec une spiritualité profonde
et pour leur enseigner la prière. Désillusionnée
par l'obéissance absolue exigée par ses supérieur.e.s
qui refusent la fondation d'un tel Carmel, Andréa rompt
ses voeux et, en 1974, elle redevient civile afin d'oeuvrer parmi
ceux et celles qui ont le désir de vivre leur foi dans
un cadre moins rigide. Commencent alors des années d'enseignement
de la méditation et de la prière, et les voyages
au Canada, en France et aux États-Unis se multiplient.
C'est pendant ces années de travail intense qu'elle rencontre
un évêque avec qui elle connaîtra l'amour.
La dernière partie du livre est consacrée à l'histoire
de cet amour, la discrétion absolue imposée par
leur situation, l'effort de renoncer à cet amour, effort
qui se solde par un échec. Prêts à quitter
le Canada et l'habit afin de pouvoir se marier aux États-Unis,
c'est d'abord Andréa qui, immobilisée par un accident,
ne peut partir. Ensuite, c'est l'évêque qui meurt
assez rapidement d'un cancer. Andréa, devenue plus militante
de par ce qu'elle a vécu et considère comme des
abus de pouvoir, commence à revendiquer les droits des
femmes au sein de l'Église et met en question bien des
dogmes, comme le célibat, que l'hiérarchie catholique
impose à ses prêtres, religieuses et aux croyants. À la
fin de son livre, elle affirme qu'elle n'a «jamais cessé de
croire en Dieu et en la prière. C'est à l'intégrité de
l'Église [qu'elle] ne croi[t] plus » (335).
L'Église
ne sort pas indemne de ce témoignage personnel qui exprime
avec franchise ce qui était positif et négatif
dans cette vie consacrée à la spiritualité et à la
foi. Mais comme le souligne l'auteure elle-même, il n'y
a pas que des despotes, mais aussi des êtres exceptionnels à l'intérieur
de l'Église. Afin d'avoir une image plus complète
des religieuses en Acadie, surtout de ce qu'elles ont fait
pour la communauté acadienne, il faudrait lire d'autres
témoignages, écrits par des femmes qui sont restées
dans leur Ordre (voir la section Textes
divers), ou bien l'hommage qu'Antonine
Maillet a rendu à une figure marquante
de la congrégation Notre-Dame du Sacré-Coeur,
dans Les confessions de Jeanne de Valois (1992). |