RONDELS
Juillet 1875
RONDELS
composés à la manière
de
Charles d'Orléans
poète et prince français
père de Louis XII, oncle de François Ier
Rivière, fontaine et ruisseau
Portent en livrée jolie,
Goultes d'argent d'orfaverie,
Chascun s'abille de nouveau,
Le Temps a laissié son manteau.
Charles d'Orléans, Rondel.
A ARMAND SILVESTRE
Acceptez, mon cher ami, la dédicace de ces Rondels, et puissent-
ils vous rendre un peu du plaisir que m'ont donné vos poëmes, si
brillants de la glorieuse extase de l'amour. J'essaie encore une
fois de ressusciter, après le Triolet et la Ballade, un de nos
vieux rhythmes français, dont l'harmonie et dont la symé-trie sont
charmantes. Des rhythmes, n'en invente pas qui veut; mais c'est
quelque chose peut-être que de tirer de l'oubli quelques-uns de
ceux que nos aïeux nous ont laissés en bloc, comme un tas de
pierreries enfermées dans un coffre, que le féroce XVIIe siècle a
failli jeter à l'eau avec tout ce qui était dedans, sans autre
forme de procès.
Le gracieux poëme que voici a le mérite encore d'éveiller
l'image d'un rimeur qui, quoique prince par-dessus le marché, fut
malheureux comme tous ses confrères, et dont le cri mélanco-lique:
Je suis cellui au cueur vestu de noir, doit retentir dans votre
âme. Il a, mon ami, de quoi nous faire songer, vous et moi, car,
tandis qu'il évoquera en vous le souvenir de Beaulté morte en
droicte fleur de jeunesse, il m'engagera à me souvenir, comme c'est
à présent mon devoir, de Ung vieil homme, lequel Aage s'appelle.
Théodore de Banville.
Paris, le samedi 10 juillet 1875.
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