Sieste



     La sombre forêt, où la roche
     Est pleine d'éblouissements
     Et qui tressaille à mon approche,
     Murmure avec des bruits charmants.

5    Les fauvettes font leur prière;
     La terre noire après ses deuils
     Refleurit, et dans la clairière
     Je vois passer les doux chevreuils.

     Voici la caverne des Fées
10   D'où fuyant vers le bleu des cieux,
     Montent des chansons étouffées
     Sous les rosiers délicieux.

     Je veux dormir là toute une heure
     Et goûter un calme sommeil,
15   Bercé par le ruisseau qui pleure
     Et caressé par l'air vermeil.

     Et tandis que dans ma pensée
     Je verrai, ne songeant à rien,
     Une riche étoffe tissée
20   Par quelque Rêve aérien,

     Peut-être que sous la ramure
     Une blanche Fée en plein jour
     Viendra baiser ma chevelure
     Et ma bouche folle d'amour.

        Avril 1842.

TABLE -- Table des Matières
Retour à la page Banville